Recherches scientifiques sur le Gwell
Plusieurs études scientifiques ont été réalisées entre 1995 et 2022 dans divers laboratoires de recherche et sur plusieurs thématiques : caractérisation microbiologique du levain Gwell, modalités de conservation du ferment pour sécuriser sa fabrication, dynamique des populations microbiennes du Gwell en lien avec la fréquence des repiquages, étude phylogénétique du Gwell pour objectiver les réseaux d’échanges de ferment…
Le Gwell a par ailleurs été caractérisé d’un point de vue sensoriel via plusieurs études, aboutissant à la conception d’une carte sensorielle du Gwell.

Caractérisation microbiologique du levain Gwell
Depuis 1995, plusieurs études réalisées par l’INRA (actuel INRAE) et l’ADRIA ont montré que la flore indispensable à la fabrication du Gwell était majoritairement constituée de bactéries lactiques mésophiles spécifiques appartenant à 2 sous-espèces de lactococoques : Lactococcus lactis sp. cremoris et Lactococcus lactis sp. lactis diacetylactis.
L’espèce Streptococcus thermophilus ainsi que des levures sont en général également présentes, à des niveaux inférieurs à celui des lactocoques. Des suivis d’acidification du lait et des observations microscopiques ont montré que l’espèce Lactococcus lactis sp. cremoris était responsable de l’acidification initiale du lait et de la texture finale du Gwell. L’espèce Lactococcus lactis sp. lactis diacetylactis permet quant à elle d’augmenter la vitesse d’acidification et transmet son goût caractéristique au Gwell en produisant des molécules aromatisantes (arôme beurre, crème, floral…). Plusieurs souches de ces 3 espèces de bactéries lactiques ont été isolées, identifiées et caractérisées : elles sont actuellement conservées à des fins patrimoniales au CIRM-BIA de Rennes, un centre de ressources biologiques dédié à la conservation des bactéries d’intérêt alimentaire.
Modalités de conservation du ferment pour sécuriser la fabrication du Gwell
Confrontés à certaines dérives ou pertes ponctuelles de leur ferment, les producteurs de Gwell ont étudié avec l’aide de l’INRAE en 2018 différentes modalités de conservation destinées à définir la méthode la plus appropriée pour sécuriser leur production de Gwell.
Diverses méthodes ont été comparées afin d’évaluer leur impact sur les caractéristiques microbiologiques et sensorielles du Gwell et sur sa vitesse d’acidification : congélation du ferment à -20°C, à -80°C, lyophilisation… Il ressort de cette étude que la congélation à -80°C est le mode de conservation le plus efficace, et que la congélation à -20°C reste un compromis intéressant car plus simple à mettre en œuvre, et pénalisant peu la qualité sensorielle. La lyophilisation est en revanche inopérante. En conclusion, retenons que la méthode qui pénalise le moins l’équilibre microbiologique du Gwell et sa qualité sensorielle reste l’échange de ferment frais entre producteurs.
LA FORCE DU COLLECTIF

Dynamique des populations microbiennes du Gwell en lien avec la fréquence des repiquages
Les producteurs de Gwell ont observé que des fabrications de Gwell très rapprochées dans le temps étaient souvent associées à des dérives sensorielles, voire à des pertes de ferment.
Pour vérifier si ces problèmes étaient effectivement liés à des fréquences de repiquages trop rapprochées, une thèse dirigée par l’INRAE en partenariat avec le CNRS a été menée par L. Von Gastrow entre 2019 et 2022. Des fabrications de Gwell ont été réalisées en faisant varier la fréquence de repiquage de 1 à 3 fois par semaine. Il a ainsi été mis en évidence que l’espèce L. lactis se développe plus rapidement à 30°C (température de fabrication du Gwell) que L. cremoris, et que ce dernier continue de se développer à 4°C (température de conservation entre 2 fabrications). La dérive de ferment serait donc liée à une modification de l’équilibre entre L. lactis et L. cremoris : des repiquages fréquents (durée d’incubation à 30°C cumulée plus longue) favorisent la croissance de L. lactis au détriment de L. cremoris (responsable de l’acidité et de la texture). Il apparaît donc important de stocker le ferment à 4°C durant plusieurs jours avant l’utiliser pour une nouvelle fabrication de Gwell.
REJOINDRE L’ASSOCIATON
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NOUS REJOINDREEtude phylogénétique du Gwell pour objectiver les réseaux d’échanges de ferment
Les producteurs de Gwell ont souhaité vérifier si les échanges de ferment opérés entre producteurs depuis plusieurs décennies ont permis d’en conserver les caractéristiques microbiologiques.
Pour vérifier cela dans le cadre de sa thèse, L. Von Gastrow a comparé les profils génétiques de souches de bactéries issues de Gwell isolées en 1998 à des souches de 2016. La méthode utilisée est la phylogénétique : elle permet d’établir les liens de parenté entre espèces, grâce à l’identification de caractères dérivant d’un ancêtre commun. Le séquençage de l’ADN microbien de 16 échantillons de Gwell provenant de différents producteurs a mis en évidence des profils très similaires, traduisant un très faible taux de mutation de ces souches au cours des 18 années de repiquages successifs. Non seulement les profils microbiologiques ont bien été préservés, mais cette étude a aussi permis de reconstituer l’historique des transferts de ferments entre producteurs.


Etude sensorielle du Gwell
La caractérisation sensorielle d’un produit nécessite la mise en œuvre d’un protocole de dégustation rigoureux, et l’entraînement spécifique d’un jury de dégustateurs.
Un travail entamé dès 2010 a permis de définir les caractéristiques sensorielles du Gwell du point de vue de son aspect visuel, sa saveur, sa texture et ses arômes. En 2021, les producteurs de Gwell se sont formés à l’analyses sensorielle afin d’établir une carte sensorielle du Gwell. Celle-ci est constituée d’une liste de caractéristiques gustatives attendues et de défauts rédhibitoires. Ainsi, le Gwell est défini par son aspect lisse et brillant. Sa texture est ferme et légèrement filante. Une couche de crème, plus ou moins épaisse selon la saison, remonte en surface du pot. Il est doux et soyeux en bouche, et dégage une agréable sensation acidulée. Ses arômes et son goût rappellent de façon subtile ceux de la crème crue et du levain.